Structure fine de l'atome d'hydrogène : Couplage Spin-Orbite
Comprendre la Structure Fine et le Couplage Spin-Orbite
Le modèle de Bohr de l'atome d'hydrogène, bien que fondamental, ne décrit pas toutes les subtilités observées dans les spectres atomiques. La structure fine se réfère au dédoublement (ou multiplet) des raies spectrales, qui résulte de corrections relativistes et d'interactions internes à l'atome. L'une des contributions majeures à la structure fine est le couplage spin-orbite.
Le couplage spin-orbite est une interaction entre le moment magnétique de spin de l'électron et le champ magnétique créé par son mouvement orbital autour du noyau (du point de vue de l'électron, c'est le noyau qui orbite et crée un champ magnétique). Cette interaction conduit à une dépendance de l'énergie de l'électron de l'orientation relative de son moment cinétique orbital \(\vec{L}\) et de son moment cinétique de spin \(\vec{S}\).
Données de l'étude
- L'électron possède un moment cinétique orbital \(\vec{L}\) et un moment cinétique de spin \(\vec{S}\).
- Les nombres quantiques associés sont \(l\) pour \(L^2\) (\(L^2 \Psi = \hbar^2 l(l+1) \Psi\)) et \(s\) pour \(S^2\) (\(S^2 \Psi = \hbar^2 s(s+1) \Psi\)). Pour un électron, \(s = 1/2\).
- Le moment cinétique total est \(\vec{J} = \vec{L} + \vec{S}\). Le nombre quantique associé est \(j\).
- L'énergie des niveaux de l'atome d'hydrogène (modèle de Bohr, sans structure fine) est \(E_n = -\frac{E_0}{n^2}\), où \(E_0 \approx 13.6 \, \text{eV}\) et \(n\) est le nombre quantique principal.
Questions à traiter
- Expliquer qualitativement l'origine physique du couplage spin-orbite dans l'atome d'hydrogène.
- L'hamiltonien d'interaction spin-orbite \(H_{\text{SO}}\) est proportionnel à \(\vec{L} \cdot \vec{S}\). Exprimer le produit scalaire \(\vec{L} \cdot \vec{S}\) en fonction des opérateurs \(J^2\), \(L^2\), et \(S^2\) et des nombres quantiques associés \(j, l, s\).
- Pour un électron dans un état avec un nombre quantique principal \(n\) et un nombre quantique orbital \(l > 0\), quelles sont les valeurs possibles pour le nombre quantique de moment cinétique total \(j\)? Discuter le cas \(l=0\).
- La correction d'énergie due au couplage spin-orbite pour l'atome d'hydrogène peut s'écrire sous la forme : \[ \Delta E_{\text{SO}} = \frac{E_n^2}{2 m_e c^2} \frac{n [j(j+1) - l(l+1) - s(s+1)]}{l(l+1/2)(l+1)} \] où \(E_n\) est l'énergie du niveau \(n\) non perturbé, \(m_e\) la masse de l'électron, et \(c\) la vitesse de la lumière. Simplifier cette expression en utilisant la constante de structure fine \(\alpha = \frac{e^2}{4\pi\epsilon_0 \hbar c} \approx \frac{1}{137}\) et \(E_n = -\frac{1}{2} m_e c^2 \alpha^2 \frac{1}{n^2}\). On pourra admettre que la correction s'écrit plus simplement : \[ \Delta E_{\text{SO}} = \frac{E_0 \alpha^2}{n^3} \frac{[j(j+1) - l(l+1) - s(s+1)]}{2l(l+1/2)(l+1)} \] (Cette formule est valide pour \(l > 0\)). Calculer le terme \([j(j+1) - l(l+1) - s(s+1)]/2\) pour les deux valeurs possibles de \(j\) lorsque \(l>0\).
- Considérons le niveau \(n=2\) de l'atome d'hydrogène.
- Quelles sont les valeurs possibles de \(l\) pour ce niveau ?
- Pour chaque valeur de \(l\), quelles sont les valeurs possibles de \(j\) ?
- Calculer les corrections d'énergie \(\Delta E_{\text{SO}}\) pour les états \(2P\) (c'est-à-dire \(n=2, l=1\)). Exprimer ces corrections en fonction de \(E_0\), \(\alpha\).
- Comment le couplage spin-orbite lève-t-il la dégénérescence des niveaux d'énergie de l'atome d'hydrogène ? Illustrer avec le niveau \(n=2\).
- Introduire la notation spectroscopique (terme spectroscopique) \(n^{2s+1}L_j\) et donner les termes spectroscopiques pour tous les états du niveau \(n=2\) après prise en compte du couplage spin-orbite.
Correction : Structure fine de l'atome d'hydrogène : Couplage Spin-Orbite
Question 1 : Origine physique du couplage spin-orbite
Principe :
Le couplage spin-orbite résulte de l'interaction entre le moment magnétique de spin de l'électron et le champ magnétique "vu" par l'électron en raison de son mouvement orbital autour du noyau. Dans le référentiel de l'électron, le proton (noyau) semble orbiter autour de lui. Ce mouvement du proton (une charge positive) crée un courant électrique, qui à son tour génère un champ magnétique au niveau de l'électron. Le moment magnétique intrinsèque de spin de l'électron interagit alors avec ce champ magnétique interne, conduisant à une énergie d'interaction qui dépend de l'orientation relative du spin de l'électron et de son moment cinétique orbital.
Question 2 : Expression de \(\vec{L} \cdot \vec{S}\)
Principe :
Le moment cinétique total \(\vec{J}\) est la somme vectorielle du moment cinétique orbital \(\vec{L}\) et du moment cinétique de spin \(\vec{S}\). On peut utiliser cette relation pour exprimer le produit scalaire \(\vec{L} \cdot \vec{S}\).
Formule(s) utilisée(s) :
Calcul :
En prenant le carré scalaire de \(\vec{J}\) :
En isolant \(\vec{L} \cdot \vec{S}\) :
Les valeurs propres des opérateurs \(J^2, L^2, S^2\) sont respectivement \(\hbar^2 j(j+1)\), \(\hbar^2 l(l+1)\), et \(\hbar^2 s(s+1)\). Ainsi, la valeur moyenne de \(\vec{L} \cdot \vec{S}\) dans un état propre de ces opérateurs est :
Question 3 : Valeurs possibles de \(j\)
Principe :
Le nombre quantique de moment cinétique total \(j\) est obtenu en combinant les moments cinétiques orbital \(l\) et de spin \(s\) selon les règles de couplage des moments cinétiques en mécanique quantique. Pour un électron, \(s=1/2\).
Calcul :
Les valeurs possibles de \(j\) vont de \(|l-s|\) à \(l+s\) par pas de 1.
Puisque \(s=1/2\) :
- Si \(l > 0\), les valeurs possibles de \(j\) sont : \(j = l - 1/2\) et \(j = l + 1/2\). Il y a donc deux valeurs possibles pour \(j\).
- Si \(l = 0\) (état S), alors la seule valeur possible pour \(j\) est : \(j = |0 - 1/2| = 1/2\) et \(j = 0 + 1/2 = 1/2\). Donc, \(j = 1/2\) est la seule valeur. Dans ce cas, il n'y a pas de dédoublement spin-orbite car il n'y a qu'une seule valeur de \(j\). De plus, l'interaction spin-orbite est proportionnelle à \(\vec{L} \cdot \vec{S}\), et si \(l=0\), \(\vec{L}=\vec{0}\), donc \(\vec{L} \cdot \vec{S} = 0\).
- Si \(l > 0\), les valeurs possibles de \(j\) sont \(l - 1/2\) et \(l + 1/2\).
- Si \(l = 0\), la seule valeur possible de \(j\) est \(1/2\).
Question 4 : Calcul du terme \([j(j+1) - l(l+1) - s(s+1)]/2\)
Principe :
Nous devons évaluer le terme \([j(j+1) - l(l+1) - s(s+1)]/2\) qui apparaît dans l'expression de la correction d'énergie \(\Delta E_{\text{SO}}\), pour les deux valeurs possibles de \(j\) lorsque \(l > 0\), sachant que \(s=1/2\), donc \(s(s+1) = (1/2)(1/2+1) = (1/2)(3/2) = 3/4\).
Calcul :
Le terme à calculer est \(\frac{1}{2} [j(j+1) - l(l+1) - 3/4]\).
Cas 1 : \(j = l + 1/2\)
Cas 2 : \(j = l - 1/2\) (pour \(l \ge 1\))
- \(l/2\) pour \(j = l + 1/2\)
- \(-(l+1)/2\) pour \(j = l - 1/2\) (avec \(l \ge 1\))
Quiz Intermédiaire 1 : La constante de structure fine \(\alpha\) :
Question 5 : Application au niveau \(n=2\)
Principe :
Pour le niveau \(n=2\), nous devons identifier les valeurs possibles de \(l\), puis pour chaque \(l\), les valeurs possibles de \(j\). Ensuite, nous appliquerons la formule de \(\Delta E_{\text{SO}}\) en utilisant les résultats de la question 4.
Calculs :
a) Valeurs possibles de \(l\) pour \(n=2\) :
Le nombre quantique orbital \(l\) peut prendre les valeurs entières de \(0\) à \(n-1\). Pour \(n=2\), \(l\) peut être \(0\) ou \(1\).
- \(l=0\) (état S)
- \(l=1\) (état P)
b) Valeurs possibles de \(j\) pour chaque \(l\) :
- Pour \(l=0\) (état \(2S\)) : \(s=1/2\). La seule valeur possible est \(j = |0-1/2| = 1/2\).
- Pour \(l=1\) (état \(2P\)) : \(s=1/2\). Les valeurs possibles sont \(j = |1-1/2| = 1/2\) et \(j = 1+1/2 = 3/2\).
c) Corrections d'énergie \(\Delta E_{\text{SO}}\) pour les états \(2P\) (\(n=2, l=1\)) :
On utilise la formule simplifiée donnée : \[ \Delta E_{\text{SO}} = \frac{E_0 \alpha^2}{n^3} \frac{[j(j+1) - l(l+1) - s(s+1)]}{2l(l+1/2)(l+1)} \] Avec les résultats de la Q4, pour \(l>0\), le terme \([j(j+1) - l(l+1) - s(s+1)]/2\) est \(l/2\) pour \(j=l+1/2\) et \(-(l+1)/2\) pour \(j=l-1/2\). Donc, la formule devient :
- Pour \(j=l+1/2\): \(\Delta E_{\text{SO}} = \frac{E_0 \alpha^2}{n^3} \frac{l/2}{l(l+1/2)(l+1)} = \frac{E_0 \alpha^2}{2n^3 (l+1/2)(l+1)}\)
- Pour \(j=l-1/2\): \(\Delta E_{\text{SO}} = \frac{E_0 \alpha^2}{n^3} \frac{-(l+1)/2}{l(l+1/2)(l+1)} = \frac{-E_0 \alpha^2}{2n^3 l(l+1/2)}\)
Ici \(n=2\), \(l=1\).
Pour l'état \(2P\) avec \(j = l + 1/2 = 1 + 1/2 = 3/2\) (\(2P_{3/2}\)):
Pour l'état \(2P\) avec \(j = l - 1/2 = 1 - 1/2 = 1/2\) (\(2P_{1/2}\)):
- Pour \(n=2\), \(l\) peut être \(0\) (état \(2S\)) ou \(1\) (état \(2P\)).
- Pour \(l=0\) (\(2S\)), \(j=1/2\). \(\Delta E_{\text{SO}} = 0\) (car \(l=0\), l'interaction est nulle).
- Pour \(l=1\) (\(2P\)), \(j=1/2\) ou \(j=3/2\).
- État \(2P_{3/2}\) (\(j=3/2\)): \(\Delta E_{\text{SO}} = +\frac{E_0 \alpha^2}{48}\)
- État \(2P_{1/2}\) (\(j=1/2\)): \(\Delta E_{\text{SO}} = -\frac{E_0 \alpha^2}{24}\)
Question 6 : Levée de dégénérescence du niveau \(n=2\)
Principe :
Sans le couplage spin-orbite (et autres effets de structure fine), tous les états ayant le même nombre quantique principal \(n\) sont dégénérés dans le modèle de Bohr (ou presque, si on considère la dégénérescence en \(l\) dans le modèle de Schrödinger non relativiste). Le couplage spin-orbite introduit une dépendance de l'énergie en \(j\) (et \(l\)), ce qui lève partiellement cette dégénérescence.
Description pour \(n=2\) :
Le niveau \(n=2\) de l'atome d'hydrogène, sans structure fine, a une énergie \(E_2 = -E_0/4\).
Il contient les sous-niveaux suivants :
- \(2S\) (\(l=0\)): Cet état a \(j=1/2\). Le couplage spin-orbite est nul pour \(l=0\). Donc l'énergie de l'état \(2S_{1/2}\) reste \(E_2\). (En réalité, d'autres effets comme le Lamb Shift affectent cet état différemment).
- \(2P\) (\(l=1\)): Ce sous-niveau se dédouble en deux niveaux à cause du couplage spin-orbite :
- État \(2P_{3/2}\) (correspondant à \(j=3/2\)). Son énergie devient \(E(2P_{3/2}) = E_2 + \Delta E_{\text{SO}}(j=3/2) = E_2 + \frac{E_0 \alpha^2}{48}\).
- État \(2P_{1/2}\) (correspondant à \(j=1/2\)). Son énergie devient \(E(2P_{1/2}) = E_2 + \Delta E_{\text{SO}}(j=1/2) = E_2 - \frac{E_0 \alpha^2}{24}\).
Ainsi, le niveau \(2P\) qui était unique est maintenant scindé en deux niveaux distincts d'énergie légèrement différente. L'état \(2S_{1/2}\) et l'état \(2P_{1/2}\) seraient dégénérés si l'on ne considérait que la correction spin-orbite de cette forme (et le terme relativiste cinétique). Le Lamb shift lève cette dernière dégénérescence.
Schéma : Levée de dégénérescence du niveau n=2 par couplage spin-orbite
Schéma illustrant la levée de dégénérescence du niveau \(n=2\) de l'hydrogène due au couplage spin-orbite.
Question 7 : Notation spectroscopique pour \(n=2\)
Principe :
La notation spectroscopique (ou terme spectroscopique) pour un état atomique est donnée par \(n^{2s+1}L_j\), où :
- \(n\) est le nombre quantique principal.
- \(s\) est le nombre quantique de spin total (pour un électron, \(s=1/2\), donc \(2s+1=2\), d'où le terme "doublet").
- \(L\) est une lettre représentant le nombre quantique orbital \(l\) (S pour \(l=0\), P pour \(l=1\), D pour \(l=2\), F pour \(l=3\), etc.).
- \(j\) est le nombre quantique de moment cinétique total.
Termes pour \(n=2\) :
Pour l'atome d'hydrogène, \(s=1/2\), donc \(2s+1 = 2\).
- Pour \(l=0\) (état S) :
- \(n=2, l=0, s=1/2 \Rightarrow j=1/2\). Terme : \(2^2S_{1/2}\).
- Pour \(l=1\) (état P) :
- \(n=2, l=1, s=1/2 \Rightarrow j=1/2\). Terme : \(2^2P_{1/2}\).
- \(n=2, l=1, s=1/2 \Rightarrow j=3/2\). Terme : \(2^2P_{3/2}\).
- \(2^2S_{1/2}\)
- \(2^2P_{1/2}\)
- \(2^2P_{3/2}\)
Quiz Intermédiaire 2 : Pour un état \(l=2\) (état D), quelles sont les valeurs possibles de \(j\) pour un électron ?
Quiz Rapide : Testez vos connaissances (Récapitulatif)
1. Le couplage spin-orbite est une conséquence de :
2. Si un électron a un nombre quantique orbital \(l=1\), son moment cinétique de spin est \(s=1/2\). Quelles sont les valeurs possibles du nombre quantique de moment cinétique total \(j\)?
3. Le terme spectroscopique pour un état de l'atome d'hydrogène avec \(n=3, l=2, j=5/2\) est :
Glossaire
- Structure Fine
- Ensemble de corrections apportées aux niveaux d'énergie des atomes (prédits par le modèle de Schrödinger non relativiste), résultant d'effets relativistes et du couplage spin-orbite. Elle conduit à un dédoublement des raies spectrales.
- Couplage Spin-Orbite
- Interaction entre le moment magnétique de spin d'une particule (comme un électron) et son moment cinétique orbital. Dans un atome, cela se traduit par une interaction entre le spin de l'électron et le champ magnétique créé par son mouvement autour du noyau.
- Moment Cinétique Orbital (\(\vec{L}\))
- Moment cinétique associé au mouvement de révolution d'une particule autour d'un point central. Pour un électron atomique, il est quantifié par le nombre quantique \(l\).
- Moment Cinétique de Spin (\(\vec{S}\))
- Moment cinétique intrinsèque d'une particule, qui n'est pas lié à un mouvement spatial. Pour un électron, le nombre quantique de spin est \(s=1/2\).
- Moment Cinétique Total (\(\vec{J}\))
- Somme vectorielle du moment cinétique orbital et du moment cinétique de spin : \(\vec{J} = \vec{L} + \vec{S}\). Il est quantifié par le nombre quantique \(j\).
- Nombre Quantique
- Nombre (entier ou demi-entier) qui caractérise une propriété quantifiée d'un système quantique (énergie, moment cinétique, etc.). Exemples : \(n, l, m_l, s, m_s, j, m_j\).
- Hamiltonien (\(H\))
- Opérateur en mécanique quantique correspondant à l'énergie totale d'un système. Ses valeurs propres sont les énergies possibles du système.
- Dégénérescence (Levée de)
- Situation où plusieurs états quantiques distincts ont la même énergie. Une perturbation (comme le couplage spin-orbite) peut "lever" cette dégénérescence, c'est-à-dire rendre les énergies de ces états légèrement différentes.
- Terme Spectroscopique
- Notation standard (\(n^{2s+1}L_j\)) utilisée pour désigner un état électronique atomique, spécifiant les nombres quantiques \(n, s, l,\) et \(j\).
- Constante de Structure Fine (\(\alpha\))
- Constante physique fondamentale sans dimension qui caractérise la force de l'interaction électromagnétique. \(\alpha \approx 1/137\).
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