Trajectoire dans un Champ de Force Central
En mécanique classique, le mouvement d'une particule soumise à une force centrale (une force qui est toujours dirigée vers un point fixe, le centre de force) possède des propriétés remarquables, comme la conservation du moment cinétique et le mouvement dans un plan. Les cas les plus connus sont la force gravitationnelle et la force coulombienne, toutes deux en \(1/r^2\), qui mènent aux trajectoires coniques de Kepler (ellipses, paraboles, hyperboles). Cet exercice explore le cas plus général d'un potentiel non coulombien, qui peut modéliser des phénomènes comme l'effet de la relativité générale sur l'orbite des planètes (précession du périhélie de Mercure) ou d'autres interactions physiques.
Données de l'étude : Particule dans un Potentiel Modifié
Schéma : Précession d'une orbite dans un champ de force non coulombien
Exemple de trajectoire en rosette (précession de l'orbite) due à une force centrale non képlérienne.
Questions à traiter
- Donner l'expression du potentiel effectif \(U_{\text{eff}}(r)\) pour ce mouvement.
- Établir l'équation différentielle de la trajectoire en utilisant la variable \(u(\theta) = 1/r\) (formule de Binet). Montrer qu'elle peut se mettre sous la forme d'un oscillateur harmonique.
- Résoudre cette équation différentielle pour obtenir \(u(\theta)\).
- Montrer que, pour des orbites liées (\(E < 0\)), les trajectoires ne sont pas des ellipses fermées mais des ellipses en précession.
- Calculer l'angle de précession \(\Delta\theta\) par révolution, c'est-à-dire l'angle dont l'axe de l'ellipse tourne entre deux passages consécutifs au périapside.
Correction : Mouvement dans un Potentiel Modifié
Question 1 : Potentiel effectif \(U_{\text{eff}}(r)\)
Principe :
Dans un mouvement à force centrale, la conservation du moment cinétique \(L\) permet de réduire le problème à un mouvement unidimensionnel en \(r\). On introduit un potentiel effectif qui inclut l'énergie potentielle réelle \(U(r)\) et un terme d'énergie cinétique de rotation, appelé barrière centrifuge.
Formule(s) utilisée(s) :
Expression :
En remplaçant \(U(r)\) par son expression :
On peut regrouper les termes en \(1/r^2\) :
Question 2 : Équation différentielle de la trajectoire (Binet)
Principe :
La formule de Binet relie la forme de la trajectoire \(r(\theta)\) à l'expression de la force centrale \(F(r)\). Elle s'exprime plus simplement avec la variable \(u = 1/r\). La force dérive du potentiel : \(F(r) = - \frac{dU}{dr}\).
Formule(s) utilisée(s) :
Formule de Binet :
Calcul de la force :
Établissement de l'équation :
On remplace \(r\) par \(1/u\) dans l'expression de la force : \(F(1/u) = -ku^2 + 2\beta u^3\). On injecte ceci dans la formule de Binet :
En réarrangeant les termes, on obtient :
Ceci est bien l'équation d'un oscillateur harmonique (\(\ddot{x} + \omega^2 x = C\)) où la variable est \(u\) et la "dérivation temporelle" est une dérivation par rapport à \(\theta\).
Question 3 : Résolution de l'équation différentielle
Principe :
L'équation est de la forme \(\ddot{x} + \omega^2 x = C\). La solution générale est la somme d'une solution de l'équation homogène (\(A\cos(\omega t + \phi)\)) et d'une solution particulière (la constante \(C/\omega^2\)).
Résolution :
Posons \(\gamma^2 = 1 + \frac{2m\beta}{L^2}\) et \(C = \frac{mk}{L^2}\). L'équation devient : \(\frac{d^2u}{d\theta^2} + \gamma^2 u = C\).
- Solution particulière : \(u_p = C/\gamma^2\).
- Solution de l'équation homogène : \(u_h(\theta) = A \cos(\gamma\theta + \phi_0)\), où A et \(\phi_0\) sont des constantes d'intégration.
La solution générale est donc :
En choisissant l'axe des \(x\) pour qu'il coïncide avec le périapside (point le plus proche, \(u\) maximal), on peut poser \(\phi_0 = 0\). La solution s'écrit alors :
\(u(\theta) = A \cos(\gamma\theta + \phi_0) + \frac{mk}{L^2 + 2m\beta}\), avec \(\gamma = \sqrt{1 + \frac{2m\beta}{L^2}}\).
Question 4 : Nature de la trajectoire (précession)
Principe :
Une orbite est fermée (comme une ellipse de Kepler) si la particule revient à sa position radiale initiale après une révolution angulaire de \(2\pi\). Pour notre solution \(u(\theta)\), cela nécessite que la période du cosinus soit un multiple rationnel de \(2\pi\). Ici, le terme \(\cos(\gamma\theta)\) est crucial.
Analyse :
La solution peut se réécrire sous la forme \(u(\theta) = u_0(1 + e \cos(\gamma\theta))\), qui est la forme d'une conique, mais avec un angle "compressé" ou "étiré" par le facteur \(\gamma = \sqrt{1 + 2m\beta/L^2}\).
- Cas Képlérien : Si \(\beta = 0\), alors \(\gamma = 1\). La solution est \(u(\theta) = A \cos(\theta) + \text{constante}\). La trajectoire est une ellipse simple qui se ferme sur elle-même. La période radiale correspond à une révolution de \(\theta\) de \(2\pi\).
- Notre cas : Puisque \(\beta > 0\), on a \(\gamma > 1\). La trajectoire n'est plus périodique en \(2\pi\). Le rayon \(r\) ne reprend pas la même valeur lorsque \(\theta\) augmente de \(2\pi\). La condition de périapside (\(u\) maximal, \(\cos(\gamma\theta)=1\)) n'est plus atteinte pour \(\theta = 2k\pi\), mais pour \(\gamma\theta = 2k\pi\), soit \(\theta = \frac{2k\pi}{\gamma}\). L'orbite ne se ferme pas et l'axe principal de l'ellipse tourne à chaque révolution : c'est la précession du périapside.
Quiz Intermédiaire 1 : La précession du périhélie de Mercure est une observation célèbre expliquée par :
Question 5 : Calcul de l'angle de précession \(\Delta\theta\)
Principe :
L'angle de précession par révolution est la différence entre l'angle nécessaire pour effectuer une oscillation radiale complète (revenir au périapside) et une révolution complète de \(2\pi\).
Calcul :
Un passage au périapside (distance minimale, \(u\) maximal) a lieu lorsque l'argument du cosinus est un multiple de \(2\pi\).
Le premier périapside est à \(\gamma\theta_1 = 0 \Rightarrow \theta_1=0\).
Le périapside suivant est à \(\gamma\theta_2 = 2\pi \Rightarrow \theta_2 = \frac{2\pi}{\gamma}\).
L'angle entre deux périapsides consécutifs est donc \(\theta_2 - \theta_1 = \frac{2\pi}{\gamma}\).
L'angle de précession \(\Delta\theta\) est la différence entre cet angle et une révolution complète :
En remplaçant \(\gamma\) :
Puisque \(\gamma > 1\), l'angle \(\Delta\theta\) est négatif, ce qui correspond à une précession "en avance" (l'ellipse tourne dans le même sens que le mouvement de la particule).
Quiz Intermédiaire 2 : Si le terme perturbateur \(\beta\) était négatif, que se passerait-il (en supposant \(1+2m\beta/L^2 > 0\)) ?
Quiz Rapide : Testez vos connaissances (Récapitulatif)
6. Dans un mouvement à force centrale, quelle grandeur physique est toujours conservée ?
7. Le potentiel effectif \(U_{\text{eff}}(r)\) est utilisé pour :
8. Une orbite de Kepler (potentiel en \(-1/r\)) ne présente pas de précession (théoriquement). Cela est dû au fait que :
Glossaire
- Force Centrale
- Une force dont la direction passe toujours par un point fixe, appelé centre de force, et dont la magnitude ne dépend que de la distance \(r\) à ce centre.
- Moment Cinétique (\(L\))
- Pour une particule, \(\vec{L} = \vec{r} \times \vec{p}\), où \(\vec{r}\) est le vecteur position et \(\vec{p}\) la quantité de mouvement. C'est une quantité conservée pour tout mouvement à force centrale.
- Potentiel Effectif (\(U_{\text{eff}}(r)\))
- Un outil mathématique qui combine l'énergie potentielle et le terme d'énergie cinétique de rotation (\(L^2/2mr^2\)) pour analyser le mouvement radial comme un mouvement à une dimension.
- Apsides (ou Apses)
- Les points d'une orbite où la distance au centre de force est minimale (périapside) ou maximale (apoapside). A ces points, la vitesse radiale est nulle.
- Formule de Binet
- Équation différentielle qui relie la forme de l'orbite (en termes de \(u = 1/r\)) à la loi de force centrale \(F(r)\).
- Précession du Périapside
- Rotation lente de l'axe principal d'une orbite elliptique. Ce phénomène se produit lorsque la force centrale n'est pas exactement en \(1/r^2\).
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